En relisant certaines notes, je suis tombé sur des archives de 2007 et de 2008 qui m’ont, bien honnêtement, étonnées. On y voyait sans surprise un PLQ immigrationniste mais surtout, un PQ chantant les louanges de la diversité : pour contrer une ADQ autonomiste et identitaire en pleine ascension, le parti jouait la carte du racisme, étiquette classique lancée aux nationalistes, étiquette woke avant son temps.
L’agonie du PQ s’explique donc facilement. Ce parti n’est plus l’ombre de lui-même. Il se cherche, il peine à se définir, il s’éloigne de ses racines. Il sombra peu à peu dans un gauchisme bien-pensant, dans un écologisme gnangnan, dans la rectitude politique, dans un mondialisme qui le rend insupportable et insignifiant. C’était le début de son nationalisme dit civique.
Les droitards et les nationalistes identitaires sont devenus avec les années des souffre-douleurs médiatiques. Ils ne surent pas, en-dehors du cercle radiophonique de Québec et de quelques commentateurs ici et là (Bock-Côté, Bastien, etc.) propager leurs idées. La défunte ADQ était, jadis, le seul parti politique capable de rallier la droite économique. Elle incarnait aussi alors une forme de droite plus nationaliste. Plusieurs affichèrent un soupir de soulagement lorsque Jean Charest fût reporté au pouvoir en 2007 après des élections générales chaudement disputées : Mario Dumont ne serait pas Premier ministre.
Avant 2007, l’influence adéquiste était somme toute limitée. Sa base électorale se concentrait dans la région immédiate de Québec. L’ADQ faisait rire, n’effrayait personne. Elle était anecdotique. Le PQ, alors confortablement assis à gauche et habité par les forces du mondialisme, espérait encore légitimement arracher le pouvoir. Le gouvernement libéral guidé par un Jean Charest de plus en plus gauchisant, accentua la tradition d’un État québécois interventionniste en lui appliquant, en prime, le modèle multiculturaliste canadien. Il voyait le Québec comme une simple province canadienne, bonne à être noyée d’immigrants. Fédéraliste convaincu, il demandait fréquemment aux Québécois de s’ouvrir davantage à l’immigration et aimait répéter qu’il fallait se méfier des discours identitaires. Un immigrationnisme qui ressemble à s’y méprendre à celui de 2022. Les supposés bienfaits de l’immigration pour le développement économique. Plus ça change…
« Plutôt que de mettre l’accent sur nos différences, on va travailler ensemble pour bâtir le Québec et attirer du monde […] Le Québec a besoin de bras, le Québec a besoin de cerveaux, le Québec a besoin de cœurs pour atteindre son plein potentiel économique […] Il importe de résister à la tentation du repli et de la méfiance. Je crois dans la diversité qui enrichit notre identité [1]».
Le mondialisme a pris véritablement son envol au Québec sous le règne de Jean Charest. En 2007, les politiciens québécois s’embourbaient dans un multiculturalisme rose bonbon et voyaient dans l’immigration le « secret de notre succès ». Bientôt, la gauche radicale et la droite libérale allaient s’allier dans un revirement historique sans précédent.
Il va sans dire que depuis, les choses se sont envenimées et apparaissent désormais incontrôlables. Les politiciens ont adopté le mondialisme et l’ont imposé, innocemment pour certains, par militantisme sauvage pour d’autres. Cette doctrine idéologique est en train de bouleverser à jamais le visage du Québec.
L’affirmation nationaliste de l’ADQ lui a occasionné une réplique cinglante, mais prévisible du gouvernement Charest, tandis que le PQ employa une offensive symptomatique du mal-être nationaliste qui le rongeait déjà – un parti souverainiste incapable de souscrire à l’objet même de sa création, c’est-à-dire la défense de la nation canadienne-française. Il subirait, lors des élections générales de 2018, une véritable raclée, une défaite historique. Il est, en 2022, placé sous le respirateur artificiel.
« La ministre de l’Immigration du Québec [du PLQ] et la chef du Parti québécois accusent l’Action démocratique de nourrir les préjugés envers l’immigration en associant le recul du français à Montréal à la hausse du nombre d’immigrants. Les affiches électorales de l’ADQ dans les circonscriptions de Bourget et Pointe-aux-Trembles, en vue des élections du 12 mai, ne sont pas passées inaperçues. Libéraux et péquistes ont dénoncé le parti de Mario Dumont qui lie la hausse du nombre d’immigrants au recul de la langue française à Montréal.
En se référant à l’étude de l’Office québécois de la langue française sur la situation du français à Montréal, le chef de l’ADQ a réagi aux critiques en disant qu’il était normal de questionner le seuil d’immigrants accepté. « Le débat est important et fondamental. On a lu en détail une étude, et elle est appuyée sur le plan scientifique, qui a fait le portrait, et ça fait partie des conclusions. De dire qu’on n’accepte pas une hausse des seuils, que ce n’est pas débattable, moi je n’accepte pas ça. La récente décision du gouvernement de réaugmenter le seuil d’un autre 10 000, pour nous, c’est une erreur. On l’a dit et redit, sans mettre en place des mécanismes, des efforts d’intégration supplémentaires et ce que je vois là-dessus, c’est que le Parti québécois a pris une position très faible. Le Parti québécois n’a pas fait ses devoirs. »
Sur la question de l’immigration, le PQ semble donc sur la même longueur d’onde que les libéraux, et la ministre de l’Immigration du Québec, Yolande James, n’a pas manqué de critiquer l’ADQ, qui alimente, selon elle, les préjugés envers l’immigration [2] ».
[1] Extrait du discours de clôture du conseil général du Parti libéral du Québec de septembre 2007. Source : ledevoir.com.
[2] Extrait d’un article publié le 25 avril 2008 sur : ici.radio-canada.ca.